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Félix Lévitan, figure du Tout de France


À force de travail, Félix Lévitan était devenu l'homme le plus puissant du cyclisme d'après-guerre. Son action permit de donner au Tour de France une dimension planétaire.


Il était commandeur dans l'ordre de la Légion d'honneur, commandeur de l'ordre national du Mérite et ancien maire d'Auffargis, mais l'inestimable mérite qu'il revendiquait, c'était d'avoir franchi les échelons de la vie à la force du poignet. Pourtant, au physique, Félix Lévitan ne pesait pas lourd : la taille et le poids d'un grimpeur au meilleur de sa forme ! Dans sa jeunesse, il s'était du reste essayé au cyclisme, aspiré par son frère et certains coureurs de l'époque, dont Toto Grassin, idole du public parisien. Que lui manqua-t-il pour persévérer ? Sûrement la classe, don qui vient du ciel. Pour les autres vertus, ce fils d'un modeste cordonnier, né le 12 octobre 1911, était largement pourvu.

C'est bien plus qu'une précision : il ne croyait pas au ciel ; il ne croyait qu'en lui. Aussi rédigea-t-il à seize ans, pour l'hebdomadaire La Pédale, le premier article de sa carrière, au titre devenu prophétique : ' Vouloir, c'est pouvoir '1. Suivait l'éloge de Lucien Michard et les considérations vives d'un jeune homme qui avait manifestement beaucoup lu Henri Desgrange (celui de La Tête et les jambes) et tenait les femmes pour l'ennemi du champion ! ' Tout est là. Savoir limiter ses désirs ! ', assenait-il avec ce ton autoritaire qui ne le quitterait jamais. Ses biographes auront beau jeu de souligner que l'apprenti reporter ne se réfrénait guère. Par nature, Félix Lévitan se sentait insatiable, ambitieux - ' Sans doute portais-je en moi une flamme particulière ', expliquerait-il sur le tard2 -, né pour commander, diriger, créer, bientôt pour régner. Parce qu'il était méthodique, il persista dans la presse, s'y avérant un échotier hors de pair, qui s'appuyait sur la confiance des pistards pour informer d'édition en édition, selon les règles du temps. Son chef d'œuvre ? Avoir été, à vingt ans, pour les lecteurs du quotidien L'Auto, le premier journaliste français à suivre de bout en bout le Giro d'Italia. C'était en 1932, et, dans le contexte, c'était un exploit. L'année d'après, L'Intransigeant récupéra le prodige qui partit aussitôt toucher de la main les magies du Tour de France... Bien sûr, il ne manqua pas d'y croiser Henri Desgrange, le fondateur de l'épreuve, accessoirement l'un de ses principaux employeurs. Directif en diable, celui-ci lui ordonna un jour de ' prendre les écarts ' dans le Galibier. L'envoyé spécial se récusa : il se devait momentanément à L'Intran. Rien ni personne, s'appellerait-il Desgrange, ne ferait échouer sa mission !

À cause de ses origines juives, Félix Lévitan fut emprisonné pendant la guerre au ' Cherche-Midi '. Sans le dévouement de son épouse, il eût été déporté - et ce pudique aimait à le dire, car il n'était pas un ingrat... Libéré, il échappa ensuite à toutes les rafles, avant de réapparaître en 1945 sous les traits d'un homme mûr, nommé par Émilien Amaury directeur des sports du Parisien-Libéré. Commença dès lors une ascension exceptionnelle, qui fit de lui un redoutable chef de presse. ' Des drames à l'Équipe ! Je vous assure, nous avons occasionné des drames ! Quand Le Parisien-Libéré sortait, sur quatre, cinq ou six colonnes, un ' scoop ' qu'ils n'avaient pas, rue du Faubourg-Montmartre... ', jubilait-il encore en février 19883. Pour autant, cet organisateur trouva sa véritable dimension en 1962, lorsqu'il accéda à la co-direction du Tour de France, en tandem avec Jacques Goddet. Que ne raconterait-on sur ces deux personnages !... La réalité est qu'ils étaient trop différents pour parfaitement s'égaler. Jacques Goddet préférait écrire que compter ; Félix Lévitan eut les mains libres. Avec pugnacité, audace, fermeté, clairvoyance, il modernisa la course. Sans rien lui ôter de son génie onirique, il la transforma en une machine définitivement rentable, qui imposait chaque année son histoire et ses mythes aux télévisions des cinq continents.

Le fait est qu'il réussissait tout, sauf à séduire. Son style sec, ses réparties cassantes lui valurent des inimitiés irréconciliables. À la stupeur générale, il fut brutalement mis à pied le 25 mars 1987 - renvoyé comme s'il avait ' volé la montre du roi sur la cheminée ', pour paraphraser le Chateaubriand de 18244. Vingt ans plus tard, la blessure saignait toujours.

La triste nouvelle n'est pas que l'ancien directeur de la Société du Tour de France soit mort nonagénaire, le 18 février 2007, mais qu'il se soit éteint avec un reste d'amertume dans le cœur.

© Christophe Penot

Retrouvez chaque mois la suite de cette série de portraits dans La France Cycliste,
le magazine officiel de la Fédération Française de Cyclisme.





1 La Pédale n° 230, 16 février 1928.
2 Sprint 2000 n° 86, février 1988.
3 Ibid.
4 Lettre de Chateaubriand au comte de Montlosier, 20 juin 1824.

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